La réhabilitation des handicapés

Quand la connaissance dans un secteur donné est dans un état embryonnaire, les gens ont tendance à juger de manière binaire : les choses sont fausses ou vraies, blanches ou noires, 1 ou 0. Mais la réalité est faite de nuances. Jaron Lanier a fait cette même observation en matière de handicap. Il a suggéré que le concept de handicap soit relatif et non absolu et que les capacités humaines s’échelonnent sur un continuum. Nous sommes plus habiles pour faire certaines tâches et moins habiles pour certaines autres. Nous sommes donc tous handicapés à un certain degré.

Les nouvelles technologies (incluant la RV) doivent aussi être conçues pour s’accommoder à la gamme la plus large possible du continuum des capacités humaines. Et la RV se révèle alors, un outil particulièrement intéressant car elle peut s’appliquer à plusieurs domaines de la réhabilitation.

Le premier est le diagnostic pour lequel la RV devient un outil de quantification du degré de handicap du patient.

Les premières applications ont été pour les handicapés de la main. Ce qui n’est pas étonnant puisque des gants sensitifs fournissent un excellent système de mesure des paramètres de la main. Le diagnostic traditionnel se fait par mesures manuelles des angles articulaires et de la force de serrage des doigts.

Des gants sensitifs peuvent aussi être utiles en diagnostic de pathologie. Wilcox et son équipe (en 1992) ont étudié l’utilisation d’un DataGlove pour le diagnostic de la maladie de Parkinson. Les malades souffrent d’un tremblement qui se reflète dans les mouvements du poignet et des doigts.

Le second domaine est le processus de réhabilitation lui-même, où la RV peut accélérer la convalescence tout en augmentant le degré de motivation du handicapé. La flexibilité des systèmes de RV les rend bien adaptés à la réhabilitation du corps humain. De nouvelles machines robotisées d’exercices virtuels peuvent remplacer les machines d’entraînement où les rééducations sont strictement répétitives et ennuyeuses. Par exemple, chevaucher une bicyclette en utilisant un casque HMD et des écouteurs stéréo 3D peut permettre une promenade dans les collines. Les performances du patient peuvent également être analysées en ligne, afin d’être certain que l’exercice prescrit est bien exécuté, et ce dans de bonnes conditions.

Le troisième domaine de réhabilitation se manifeste en tant que canal de communication permettant une amélioration de la qualité de vie du handicapé. Pour s’intégrer à la société on sait que les handicapés doivent franchir nombre de barrières. Certaines d’entre elles sont liées au handicap moteur rendant difficile tout accès à un bâtiment. D’autres ont trait à la communication avec les gens comme les aveugles ou les sourds. La RV peut jouer un rôle important pour briser ces barrières et favoriser l’intégration des handicapés.

En 1992, le Congrès Américain a voté une loi ("Americans with Disabilities Act") qui oblige à ce que chaque bâtiment soit d’un accès aisé aux handicapés. Les entrées doivent être équipées de rampes pour fauteuils roulants, comporter des couloirs assez larges, ... A l’évidence la méthode habituelle de conception des immeubles en construisant une maquette n’était pas adaptée au problème. Pour mettre en application cette loi, les architectes devaient trouver un moyen de vérifier que leurs projets étaient en conformité avec les obligations qu’ils comportaient. Pratiquement, la meilleure façon consistait à adopter le point de vue d’une personne se déplaçant sur un fauteuil roulant. Une "chaise roulante en RV" a alors été réalisée. Le concepteur peut alors naviguer dans l’immeuble avec sa chaise roulante instrumentée avec un casque HMD. Un DataGlove capte les gestes de la main du concepteur. La main virtuelle correspondante allume, éteint des lumières, ...

L’amélioration de la communication est aussi un point important d’aide à la qualité de vie des handicapés. Aux Etats-Unis, on estime qu’il y a deux millions de sourds. Ils communiquent par gestes de la main et de la tête et avec le langage des sourds et muets. Les non-sourds ne connaissent pas ces langages. Des gants sensitifs ont été proposés pour aider à faire le pont entre ces deux types de connaissances. Ces gants sont des DataGlove ou CyberGlove reliés à un système de reconnaissance de gestes basé sur des réseaux neuronaux. La sortie du réseau neuronal est envoyée à un synthétiseur de parole en direction de la personne qui entend.